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Juillet 2004
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3
J'ai relu le synopsis,
découvert les fiches "personnages", puis j'ai
apprécié les quelques planches jointes au mail de
Sang-Po. C'est bien ficelé cette histoire et la
présentation est accrocheuse. Je ne peux pas croire que
les envois qu'il vient de faire ne déboucheront pas sur
des rendez-vous.
Toï, toï lui ai-je
répondu. Tu m'épates. Je suis fière de toi.
4
Nos pieds nus se
déplacent silencieusement sur le parquet brillant. Les
yeux perdus devant tant qui m'émerveille (cet autel, un
véritable cabinet de curiosités), mes orteils viennent
buter contre ceux de Kunga. Echange de regards malicieux
alors que mon pouce s'avance pour jouer avec le sien.
Il se recueille devant son
panthéon et je m'éloigne pour admirer les tangkas
anciens suspendus au mur. La pièce est juste éclairée
de quelques lampes à huile et photophores colorés. Le
long des corniches, je devine des élèments d'une frise
peinte, cavalcade de vibrants coloris. Une petite
fenêtre ouverte sur l'agitation qui règne en bas près
de la scène, des gouttes de pluie enivrant les feuilles
de majestueux bambous qui ballotent forment un certain
contraste avec le calme ambiant.
Je redescends vers la
librairie et Philippe, un ami de Kunga, me rejoint pour
tenter de reprendre notre discussion sur la nature des
émotions lorsque, sauvée, les premières mesures du
spectacle donné par la commauté tibétaine pour
l'anniversaire du Dalaï Lama retentissent.
La scène a été
installée en plein air et ni les artistes, ni les
spectateurs ne sont protégés de la pluie. Le portrait
de sa Sainteté, lui, a été recouvert d'un plastique.
Nous allons à tour de rôle nous réapprovisionner en
thé brûlant et beignets. Mon voisin, un vénérable
lama qui se tient sous un grand parapluie de papier
huilé bordeaux chantonne doucement en hochant du chef et
lorsque nos regards se croisent, il ne ménage pas ses
sourires. Assise entre lui et Kunga, je suis tout
simplement bien. Qu'importe qu'il pleuve.
5
J'avais déjà beaucoup
apprécié le texte sur la Petite Avalanche mais alors
là, Mathias Malzieu a fait très fort en me faisant rire
dans le métro.
Histoire de fantômes en
papier ("38 mini westerns") :
"Cette nuit, les
mouchoirs en papier usagés se sont mis à danser dans ma
corbeille. De vrais petits fantômes, tout frippés et
tout sales.
L'un d'eux a essayé
de s'envoler par-dessus la corbeille, attiré qu'il
devait être par le ciel électrique tout en néons et
toiles d'araignées de mon appartement.
Mais il s'est pris les
pieds dans un chewing-gum à la menthe pas tout à fait
sec. Ca faisait marrer les autres, ils avaient la gueule
pleine de morve, ils étaient assis dans une poubelle
mais ils se foutaient de la gueule de celui qui s'était
pris les pieds dans le chewing-gum à la menthe."
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8 15h30. Au bout du fil le Dr M.
"...voilà, comme votre cas est un
peu compliqué, j'ai eu deux fois au téléphone le Pr R
et le Dr A, que vous avez rencontrés mardi, afin
d'organiser vos interventions avec un maximum de
sécurité. On vient de se mettre d'accord tous les trois
et si vous le pouvez on vous hospitalise lundi et on
réalise les deux opérations dans la même journée.
C'est le Pr R qui fera la deuxième opération et il sera
encore à la clinique mardi pour voir comment vous allez
(moi, j'entends "au cas où"). Lundi, est-ce
envisageable pour vous ?"
J'ai dit oui. Et j'ai une trouille
bleue.
Je me dis que ça va aller, que je
devrais être quand même rassurée puisque je suis entre
les mains d'une très bonne équipe, si ce n'est la
meilleure en la matière.
Mais non, j'ai une trouille bleue.
D'ailleurs mes nuits depuis mardi sont peuplées de
cauchemards.
Bref.
Je pars retrouver Metog demain soir à la campagne
avec l'envie de passer un week-end tranquille, de
profiter de cette pause "au vert" avant la
semaine qui arrive. Cependant, je doute que ce soit le
cas. Il y a cette conversation que j'aimerais pouvoir
remettre à plus tard mais je ne le ferai pas. Il y a ma
grand-mère à l'hôpital qui ne va pas bien du tout,
avec qui je veux passer du temps parce que je ne peux
m'empêcher de penser que ça pourrait être la dernière
fois ... nous le savons désormais, le traitement n'est
plus efficace, le prochain malaise (le sang remonte de
plus en plus difficilement des membres inférieurs vers
le coeur) pourrait être celui dont elle ne se relèvera
pas.
Mon coeur, ce soir, me donne l'impression de battre à
l'envers.
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19
Une seconde d'hésitation parce que
j'ai le sentiment, malgré tout, de faire une connerie.
J'ouvre l'enveloppe kraft, les pages imprimées glissent
sur le bureau. Je plonge dans sa vie. Mes mains tremblent
un peu en tournant les pages.
Je passe sur mon PC et, un clic un peu
plus tard, j'ai les joues rouges comme si j'avais reçu
une gifle.
Maudite impulsion. Stupide
présomption.
Je préssentais cette différence mais
je ne l'imaginais pas ainsi.
Elle ne tient qu'à quelques mots.
Je vais faire quoi de tout ça,
maintenant ?
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20
Je flotte. Je vais et
viens dans l'appartement, je sors faire quelques courses
après être passée chez l'infirmier qui me refait mon
pansement, avec le sentiment que je suis une sorte de
décalcomanie de moi-même qu'une brise pourrait aplatir
contre le prochain panneau de sens interdit. Je ne peux
pas dire que je me sente très mal, non. Je suis juste
pas là. Je fonctionne, mécaniquement. Et j'oublie mon
pain de seigle et ma part de flan à la terrasse du Vrai
Paris, où je parcours Libé sans m'imprégner de ce que
je "lis" et je perds mon portable.
Dans un instant, je pars rejoindre JG
rue Tholozé pour une séance de ciné puis nous irons
dîner dans l'un de ces petits restaus du coin que
j'apprécie. Peut être celui au bas de la butte. Si ....
Je crois que je vais lui proposer de
rester dormir à la maison. On sait jamais. Peut être
que, sans m'en rendre compte" je suis entrain de
tenter une "out of body exp"..
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25 Je me suis réveillée alors que la porte
claquait derrière lui. Dans la cuisine, le café
finissait de passer. Un petit mot était glissé dans
l'anse de la cafetière.
"I want to eat your skin like a
whole almond..."
Carnal frenzy de fin de soirée et mon
oreille droite pour m'en souvenir encore quelques jours.
Il a également laissé la carte du jeu
de tarot me correspondant, le soleil, et sa définition :
The light of the Sun reveals all. The Sun is
joyful and bright, without fear or reservation. The
childish nature of the Sun allows you to play and feel
free. Exploration can truly take place in the light of
day when nothing is hidden. The Sun's rays fill you with
energy so that you may live life to its fullest, milking
pleasure out of each day. Such joy and energy can bring
wealth and physical pleasure. To shine in the light of
day is to have confidence, to soak up its rays is to feel
the freedom of a child.
Pourquoi n'ai je cessé de penser au parfum du
soleil sur la peau de Rot-Sa ? Pourquoi est-ce que
je n'arrive pas à accepter sa position ?
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28 Le temps file, file à vive allure, entre les
longues conversations avec Ponya, visites de JG (pffff,
"Vénus et Fleur" du Rohmer, je rêve !),
Tserba (qui nous avait préparé un vrai festin hier soir
dont un sublime cheese-cake aux fraises), Dalba, Sang-Po,
les visites chez l'infirmier jusqu'à la dernière
vérification de lundi après l'enlèvement des fils
jeudi, les balades dans mon quartier avec une pause
nécessaire à la terrasse des cafés de la rue des
Abbesses, parce que je me fatigue assez vite, parce que
ma cicatrice à 10 points tiraille, la lecture (enfin
réinscrite à la biblio) allongée au frais dans ma
chambre en sirotant des root beers ("Les robots et
l'empire" d'Asimov, j'accroche pas trop; "Ce
qui reste de jour" journal 1966/1972 de J Green,
fort intéressant ; restent "Carnets Intimes"
de Sylvia Plath et "Dans ma peau"
Autobiographie de Doris Lessing), la location de DVD, le
classement et rangement d'un tas de paperasses, l'apéro
chez les voisins du 2ème (enfin l'occasion d'offrir la
petite gourde "dinosaure" Sigg à Anton) ...
une vie à petite allure mais qui a le drôle de goût de
filer.
En parallèle, il y a l'écriture. Des
textes que je n'arrive pas encore à mettre en ligne.
Peut être les insérerai-je un peu plus tard ici. Il
faut croire que je n'ai pas encore réussi à totalement
me libérer ...
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30 La visite de Ponya, comme toujours, c'était du
plaisir et ça m'a fait un bien fou. Pas seulement parce
qu'il y a cette énergie bienfaisante qui se dégage
d'elle que je ressens fortement et qui est bénéfique
mais parce que nous partageons une certaine vision de ce
que nous voulons achever dans nos vies, une sensibilité
semblable et, par dessus tout, un appétit de vivre. Ce
qui m'est très précieux, également, c'est ce sentiment
d'être en terrain de liberté, en totale confiance,
comprise. Je crois que c'est réciproque et ça, ça n'a
pas de prix.
Au cours de nos conversations, il y a
eu des moments d'émotion quand ce qu'elle disait faisait
fortement écho en moi ou me ramenait à ce sentiment
d'impuissance que j'avais ressenti lorsqu'elle s'était
un peu racontée, il y a quelque temps, et que des
milliers de kilomètres nous séparaient. Y'a pas, rien
ne vaut une présence physique, un regard, un geste même
s'il est maladroit comme lorsqu'on se contente de
caresser un bras pour soutenir une parole difficile alors
qu'on aurait envie de laisser la tête de l'autre se
nicher au creux de son épaule, de l'entourer de ses bras
pour qu'il puisse s'abandonner un instant, lâcher un peu
du trop plein. Ca c'était rue d'Orsel, dans cette
fraction de seconde où j'aurais voulu pouvoir lui
apporter plus, lui rendre ce qu'elle sait si bien donner,
avant qu'elle ne se reprenne.
Si je devais résumer les conversations
que nous avons eues chez Kunga, en battant le pavé, à
la Rose Bakery, je dirais que nous tentons au mieux de
tailler nos vies à notre mesure, en restant le plus
fidèle possible à ce que nous sommes. C'est un vrai
challenge, jamais perdu de vue, parfois un jeu, toujours
un chantier.
Work in progress.
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31 Découvert par Ponya lors d'une expo sur Chagall
vue récemment, un poème qu'il a écrit après le
décès de Bella et qui nous a touché.
Seul est mien
Le pays qui se
trouve dans mon âme
J'y entre sans
passeport
Comme chez moi
Il voit ma tristesse
Et ma solitude
Il m'endort
Et me couvre d'une
pierre parfumée
En moi fleurissent
des jardins
Mes fleurs sont
inventées
Les rues
m'appartiennent
Mais il n'y a pas de
maisons
Elles ont été
détruites dès l'enfance
Les habitants
vagabondent dans l'air
A la recherche d'un
logis
Ils habitent dans
mon âme
Voilà pourquoi je
souris
Quand mon soleil
brille à peine
Ou je pleure
Comme une légère
pluie
Dans la nuit
Il fut un temps où
j'avais deux têtes
Il fut un temps où
ces deux visages
Se couvraient d'une
rosée amoureuse
Et fondaient comme
le parfum d'une rose
A présent il me
semble
Que même quand je
recule
Je vais en avant
Vers un haut portail
Derrière lequel
s'étendent des murs
Où dorment des
tonnerres éteints
Et des éclairs
brisés
Seul est mien
Le pays qui se
trouve dans mon âme
(1945-1950)
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Stealing
stuff brings bad karma © 2004 |
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